Ce 4e dimanche de Pâques est traditionnellement appelé le dimanche du bon Pasteur. On y lit un extrait du chapitre 10 de l’évangile selon St-Jean ; on y prie particulièrement pour les vocations ; on y fait la collecte pour soutenir la pastorale des vocations et la formation des séminaristes (pas de chance pour eux en 2020 ; ils seront au pain sec et à l’eau !).
Cette année, nous lisons le début du chapitre 10 (versets 1 à 10). C’est ce que je vous invite à faire avant de poursuivre cette méditation https://www.aelf.org/2020-05-03/romain/messe .
Dans la suite immédiate du passage lu ce dimanche, Jésus déclarera qu’il est « le bon pasteur, le vrai berger qui donne sa vie pour ses brebis » (v. 11). Mais ce que nous lisons et entendons aujourd’hui est comme l’introduction de cette affirmation de Jésus, et elle ne me semble pas dénuée d’intérêt ni même de pertinence pour nos mentalités contemporaines.
Jésus commence par mettre en scène une situation fictive, un peu comme les paraboles qu’il aime tant raconter : il oppose l’attitude des voleurs et des bandits, qui pénètrent dans la bergerie par effraction, et celle du berger qui, lui, passe par la porte ; ce dernier jouit de la confiance de ses brebis, car il les connaît par leur nom, et les brebis connaissent sa voix. Dans un deuxième temps, Jésus déclare :
« Moi, je suis la porte. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra entrer ; il pourra sortir et trouver un pâturage ».
Jésus dit donc deux choses un peu différentes, mais qui s’enchaînent : d’abord il déclare passer lui-même par la porte ; ensuite il dit qu’il est, en personne, la porte par qui on peut passer pour trouver la vie…
Posons-nous la question : quelle est la porte par laquelle Jésus est passé pour entrer dans la bergerie, à savoir pour nous rejoindre ? Ne serait-ce pas sa condition humaine, l’incarnation du Fils de Dieu, l’abaissement de celui qui, « ayant la condition de Dieu, a pris la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes et obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix » (cf. Philippiens 2, 6.7-8). Ceci nous amène à considérer d’abord et avant tout Jésus comme « l’agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde » (Jean 1, 29) en assumant tout ce qui fait notre condition humaine, et en nous sauvant de la mort en y plongeant lui-même. Dans le fond, la porte empruntée par Jésus, ou –pour dire les choses autrement- la « clé » pour tout comprendre de Dieu et de notre destinée, c’est le mystère pascal que nous célébrons de façon festive en ces jours. Voilà ce qui donne à Jésus le crédit qu’on peut attendre du vrai berger : il donne sa vie pour ses brebis, en étant d’abord et avant tout l’agneau de Dieu…
La suite du propos de Jésus devient alors logique : il se présente comme la porte par laquelle nous pouvons passer pour trouver la vie et la liberté authentique, sans craindre d’être pris au piège par un gourou ou un voleur. Agneau, il nous rejoint jusque dans la mort ; berger, il nous prend dans sa résurrection. Vivre greffé au Christ en sa Pâque : voilà le chemin que nous pouvons emprunter pour trouver les pâturages qui nourriront nos existences.
Comme le font les portes de nos maisons, le Christ à la fois nous protège et nous ouvre à de nouveaux horizons. Nous pouvons passer par lui, en toute confiance. Comme le dit l’apôtre Pierre dans la 2e lecture de ce jour :
« Lui-même a porté nos péchés, dans son corps, sur le bois, afin que, morts à nos péchés, nous vivions pour la justice. Par ses blessures, nous sommes guéris. Car vous étiez errants comme des brebis ; mais à présent vous êtes retournés vers votre berger, le gardien de vos âmes » (1 Pierre, 2, 24-25).
Abbé Jean-Pierre Lorette.
PS : ce dimanche à Bonne-Espérance aurait dû avoir lieu la première messe de la saison 2020 chantée en grégorien. A défaut, et avec un clin d’œil, les amateurs de latin peuvent regarder et écouter :