« J’ai désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec vous » (Luc 22, 15)
Partager un repas avec nos proches, avec des amis : c’est assurément une des premières choses que nous ferons, dès que nous le pourrons à nouveau. Le confinement nécessaire nous fait prendre conscience de ceci : il ne suffit pas de savoir que telle personne que nous aimons est en vie et tient le coup ; il ne suffit pas non plus d’avoir contact avec elle par téléphone ou par les réseaux sociaux. Ce qui nous manque cruellement, c’est de nous voir, de nous toucher, de partager un repas ! Nous avons besoin de « communier » réellement les uns avec les autres, et pas seulement de loin ou virtuellement.
Le mot « communion » fait partie du langage commun chrétien. Mais en ce jeudi saint 2020 si particulier, nous pouvons le dépoussiérer et saisir en quoi il est essentiel et condense le cœur de la foi chrétienne. Si Dieu est amour, il souhaite se faire proche, nous rejoindre, plonger dans nos vies de l’intérieur, et non pas en restant au-dessus ou à l’extérieur de nous. De son côté, l’être humain, avec la soif d’absolu qui l’habite, aspire fondamentalement, lui aussi, à s’unir à l’Eternel, à Dieu, dans une plénitude d’amour.
C’est exactement l’œuvre de communion que Jésus vient accomplir, lui qui est pleinement Dieu et pleinement humain. Et cette communion de Dieu en nous et de nous en Dieu, il vient l’établir jusque dans ces zones où nous aurions pensé qu’entre Dieu et nous, la rencontre n’est pas possible : la mort de notre côté, la vie pour toujours, du côté de Dieu.
Dans son repas pascal, Jésus donne sens aux heures douloureuses qui vont suivre, et il nous donne un sacrement qui permettra à jamais la communion ici-bas : « Prenez et mangez, prenez et buvez, C’est mon corps, mon sang, versé pour vous. Faites cela en mémoire de moi ».
Comme pour mieux nous faire comprendre : lors du même repas, Jésus lave les pieds de ses disciples, et dit à Pierre :
« Si je ne te lave pas, tu n’auras pas de part avec moi » (Jean 13, 8)…
Entendons Jésus nous redire, en ce jeudi saint 9 avril 2020 :
« J’ai désiré d’un grand désir manger cette Pâques avec vous avant de souffrir. Car je vous le déclare : jamais plus je ne la mangerai, jusqu’à ce qu’elle soit pleinement accomplie dans le royaume de Dieu » (Luc 22,15-16).
Cet accomplissement, il ne le conçoit pas sans que nous nous retrouvions à sa table, définitivement…
Abbé Jean-Pierre Lorette